Zibaldone salentino (extrait 21)

di Gianluca Virgilio

Jeunes d’aujourd’hui, jeunes d’hier. Je suis pris d’un doute : que mon avancée en âge, au commencement de la vieillesse, ne vienne influencer mon jugement sur les jeunes. Dénigrer les jeunes est en effet typique des vieux, à cause d’un sentiment de jalousie mal maîtrisé ; ils préfèrent le bon vieux temps, laudatio temporis acti et deprecatio temporis agentis sont toujours les deux faces de la même médaille, celle de l’incapacité à comprendre le présent. Mon attitude vis à vis des jeunes revêtirait-elle cet aspect ? Se pourrait-il, en somme, que je ne comprenne plus les jeunes ?

La comparaison entre les jeunes d’hier et ceux d’aujourd’hui me remet en mémoire le conformisme de mes contemporains d’autrefois, la solide adhésion à ce qu’étaient nos conditions de vie, les mythes dont je ne me suis affranchi qu’au prix d’un vrai travail sur moi-même. Se peut-il que j’ai oublié tout cela ? En réalité, les jeunes d’aujourd’hui ne sont pas très différents de ceux d’hier, ni pires ni meilleurs, peut-être sont-ils juste un peu moins frustes et plus domestiqués. Comme mes contemporains d’il y a quarante ans,  idéologiquement bien dans la ligne, ils vivent sans regret, leur unique préoccupation, celle qui guide absolument leur approche de la vie, étant de trouver la meilleure colocation possible, aux conditions qui leur sont consenties ou qu’à l’occasion ils s’ingénieront à créer. Ils veulent se faire une « position ». Qui pourrait les en blâmer ?

Le temps. Nous disposons tous d’un segment de temps entièrement à nous, qui ne coïncide avec aucun autre. Et pourtant, tous les segments humains s’entrecroisent, de sorte que si nous projetions cette idée sur une surface plane, nous verrions un maillage extrêmement dense de segments enchevêtrés, une carte du temps humain. Une carte qui montre le destin commun des hommes, où chacun, tout en ayant son propre temps entièrement à sa disposition, est relié au temps des autres. Ainsi notre vie sociale correspond-elle à notre vie dans un temps commun. Se suicider, c’est briser son propre segment temporel,  rompre de sa propre initiative le réseau du temps qui unit les hommes – ce qui explique que chaque société abhorre le suicide.

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